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David Le Bris, enseignant-chercheur en finance à la Toulouse Business School.

23 juillet 2018 Ecole

Le groupe BPCE, maison mère du Crédit Foncier, a annoncé mardi 26 juin l’absorption des activités du spécialiste du crédit immobilier dans ses différentes filiales. Pour David Le Bris, le déclin du Crédit Foncier remonte à la Première guerre mondiale.

 

Pourquoi le Crédit Foncier avait-il été créé en 1852 ?

David Le Bris : La création du Crédit Foncier a d’abord servi d’argument politique pour le candidat Bonaparte, qui cherchait à résoudre les problèmes de financements des campagnes, dont les activités agricoles souffraient des investissements massifs réalisés dans la construction du premier réseau ferré. Et puis il y avait quelque chose dans l’air du temps. Ce système des prêts hypothécaires, c’est-à-dire attachés aux biens, connaissait un certain succès à l’étranger.

Ce modèle a très bien fonctionné, au point qu’il a financé en grande partie la construction des immeubles haussmanniens. Preuve de son succès, l’établissement bancaire a également exporté son modèle dans d’autres pays comme l’Argentine et l’Espagne.

Comment expliquer le succès de son modèle économique ?

David Le Bris : Le Crédit Foncier a délaissé rapidement les activités agricoles pour se concentrer sur le financement des immeubles urbains, plus rentables. Il émettait des obligations à très long terme (de 50 à 80 ans) et prêtait sur la même durée. Des prêts qui ne représentaient que la moitié de la valeur des biens, ce qui mettait le Crédit Foncier à l’abri des crises immobilières.

La banque a surtout bénéficié d’une gouvernance de qualité : elle était en partie contrôlée par l’État, et l’on demandait à ses dirigeants d’acheter un nombre considérable d’actions de la société, ce qui devait les inciter à une bonne gestion. Dans le système actuel des stock-options, les patrons ne courent plus aucuns risques de pertes.

 

À partir de quand peut-on parler de déclin du Crédit Foncier ?

David Le Bris : Tout s’arrête à partir de la Première guerre mondiale. L’inflation monte et l’investissement se tarit car le gouvernement décide de bloquer les loyers. À quoi bon investir, tandis que les coûts de construction, pendant ce temps, s’envolent avec l’inflation ? Le Crédit Foncier ne s’en relèvera jamais vraiment. Après 1945, il s’est transformé en gestionnaire de la pénurie car les capitaux avaient disparu. L’État lui a alors accordé un quasi-monopole sur les prêts aidés, qui permettaient de réorienter l’épargne en direction de l’immobilier.

Son modèle était donc condamné ?

David Le Bris : Oui, car son modèle n’a plus de sens aujourd’hui. Toutes les banques se battent désormais pour accorder des prêts immobiliers, et le Crédit Foncier, spécialisé dans ce domaine mais incapable de facturer d’autres services bancaires, avait du mal trouver l’équilibre.

Ce qui n’empêche pas certaines de ses caractéristiques originelles de rester en partie pertinentes : aujourd’hui, les banques commerciales assument le risque de prêter à 2 / 3 long terme alors qu’elles n’ont de capitaux disponibles qu’à court terme. De nombreuses banques ont fait faillite pour cette raison lors de la crise de 2008, ce qui n’aurait pu arriver au Crédit Foncier puisqu’il prêtait sur une durée équivalente à ses ressources. C’est ce qui lui a permis de rester stable et efficace pendant aussi longtemps.




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1 Commentaire

Il y a 6 ans
Mr Le Bris a un excellent esprit de synthèse.

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