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Nos Parcours Incroyables : Stéphane THION (TBS 1988)

11 novembre 2019 Portraits / Podcasts

Enseignant-Chercheur en marketing à TBS

"Un projet se construit par briques. On accumule des briques à travers nos différentes expériences."

 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Pourquoi avez-vous choisi Toulouse, et TBS, pour suivre vos études?

A l’époque (années 1980s !) mes parents habitaient Toulouse. Après le lycée Pierre de Fermat, je me suis dirigé vers le marketing. Mes résultats au BAC n’étant pas fabuleux j’ai choisi la voie universitaire. J’ai obtenu un DUT Techniques de Commercialisation à Paul Sabatier puis je suis entré en admission parallèle à « Sup de Co » !

Pouvez-vous nous parler de votre parcours étudiant à TBS ? 

Entrer à l’ESC c’était intégrer une institution emblématique, voire intimidante. Mais, sortant d’un l’ IUT, mon adaptation a été rapide et aisée. J’ai alors choisi une voie originale avec une spécialisation « Systèmes informatisés » de gestion en dernière année. Mon stage de fin d’année m’a permis de publier un ouvrage (édité chez Milan media) sur une technologie nouvelle à l’époque, les « mémoires optiques » ! Ce vocable englobait à l’époque les CR-ROM et CD réinscriptibles… les DVD, et à fortiori les clés USB, n’existaient pas encore ! Puis j’ai écris un papier avec Jacques Digout sur l’utilisation de ces supports en gestion.

Avez-vous des anecdotes de promo à partager ? (Associations étudiantes, projets, professeurs…)

Je dois avouer que j’étais un étudiant discret et peu impliqué dans la vie associative. Mais je me rappelle bien sûr des soirées endiablées ! Il ne s’agissait plus de la célèbre « cave » car j’ai intégré l’école l’année de l’installation boulevard Lascrosses.  Superbe bâtiment. Mais dans le BTP la qualité peut être un vain mot. Je ne me rappelle plus exactement si c’était lors de ma première ou seconde année, mais les dalles roses se sont rapidement décollées de la belle façade…

Le corps professoral a laissé une forte empreinte dans ma mémoire. Jean-Claude Merlane, Claude Courtois, Dwight Merunka, le jeune Jacque Digout sont des professeurs qui m’ont tout particulièrement marqués.

 

Qui êtes-vous aujourd’hui ?

Dans quelle optique êtes-vous entré(e)s dans la vie active après le diplôme ? Quelles étaient vos motivations ?

Après 2 ans en IUT et 3 ans à l’ESC, je n’avais qu’un objectif en tête : entrer dans la vie professionnelle ! Mais il m’a fallu auparavant  faire l’armée (le service national existait encore). Je suis donc parti faire l’école des officiers, dans l’artillerie, puis j’ai été « chef de section ». Première expérience de management. Expérience marquante. Je suis donc arrivé sur le marché de l’emploi entre fin 1990 et début 1991. Période de récession économique et par conséquent peu favorable à la recherche d’emploi. Au bout de 6 mois de recherche et une centaine de lettres de motivation, j’ai fini par décrocher un poste de chargé d’études marketing à Lyon. C’est ainsi que j’ai intégré le groupe France Telecom qui deviendra Orange dans les années 2000. J’y suis resté 16 ans. Au bout de quelques années, je suis passé Directeur Marketing en Business Unit, principalement sur les marchés des professionnels puis des entreprises. A Lyon puis à Montpellier. Le hasard des réorganisations successives au sein de France Telecom puis Orange m’ont alors  ramenées à ma ville d’adoption, Toulouse. En 2004, suite à la fusion des agences de Montpellier et de Toulouse, je me retrouve alors Directeur Marketing de l’Agence Entreprises Orange Business Services ont le siège est toujours à la Plaine, à côté de la Cité de l’Espace. J’y ai notamment retrouvé Thierry Decocq, un ancien ESC de ma promo !

Quelle est votre situation actuelle ?

Aujourd’hui, je suis enseignant-chercheur. J’ai en effet quitté Orange en 2008 afin de concrétiser un vieux rêve : créer mon entreprise. Les conditions étaient alors réunies. Sauf que… il s’agissait d’une entreprise d’édition de livres et nous sommes tout début 2007. Quelques mois plus tard, le monde est secoué par la crise des subprimes. Puis le secteur de l’édition est confronté à une crise terrible. Quelques-uns de mes distributeurs et de nombreux clients finaux (librairies) disparaissent. Je parviens à tenir jusqu’en 2014, année où je cesse l’activité. En parallèle, dès 2011, j’avais commencé à enseigné le marketing, la gestion de la relation client et le management en BTS.

Pourquoi avoir choisi ce métier, ce projet ?

Après avoir fait atterrir en douceur ma petite entreprise, LRT Editions, maison d’édition spécialisée dans l’histoire militaire, il me fallait construire un nouveau projet professionnel. Le monde des affaires ne m’attirait plus. Déjà, des décennies de surconsommation épuisaient notre planète. Marketer des produits dont les déchets allaient asphyxier nos terres et nos océans avait-il du sens ? Lancer plan d’action après plan d’action, enchainer jour après jour les reportings… où était la valeur de ces tâches quotidiennes ? Durant mes sept années de créateur d’entreprise, j’étais devenu éditeur mais aussi auteur. L’écriture d’ouvrages et d’articles consacrés à l’histoire militaire m’ont fait découvrir l’écriture et la recherche. En parallèle, les cours donnés en BTS ont révélé en moi une nouvelle passion : l’enseignement. Ma nouvelle voie s’affichait donc clairement : l’enseignement-recherche. Il ne s’agirait plus d’accompagner voire provoquer la surconsommation mais de créer un autre type de valeur : contribuer à la diffusion de la connaissance, contribuer à la montée en compétence de mes concitoyens. Mon champ d’action serait certes toujours le marketing. Mais même le marketing a pris conscience de ses torts.

A partir de quel moment avez-vous su que cette voie était faite pour vous ?

Capitaliser sur mon métier d’éditeur et me lancer dans la recherche et l’écriture a été la première étape. La recherche (historique à ce moment-là) est alors devenue une passion. Puis, je me suis mis à enseigner dès que le métier d’éditeur ne m’a plus permis de vivre. Et l’enseignement est vite devenue une seconde passion. C’est ainsi que j’ai trouvé ma vocation : l’enseignement-recherche.

Comment êtes-vous arrivé(e)s où vous en êtes aujourd’hui dans votre carrière professionnelle ? (Les grandes étapes à prendre en compte)

Un projet se construit par briques. On accumule des briques à travers nos différentes expériences. A nous de les agencer afin d’en faire une construction solide. Plus de quinze ans d’expériences au sein d’un grand groupe comme Orange m’ont beaucoup appris : en termes de management mais aussi en termes de rigueur. Mes différentes expériences au sein d’Orange ont toutes été exceptionnelles. J’ai eu la chance d’œuvrer au sein de comité de directions unis. Notre action commune nous a permis de déplacer des montagnes. Ces expériences ont non seulement été enrichissantes mais aussi des aventures humaines inoubliables. Si j’ai quitté Orange, ce n’est pas donc par dépit. J’avais un projet et il me fallait prendre une nouvelle route. Car ces grands groupes peuvent aussi devenir des carcans. S’épanouir dans un quel cadre, sans y perdre ses valeurs, peut s’avérer compliqué. Ne nous le cachons pas : quitter la sécurité d’un grand groupe et donc sortir de sa zone de confort est un choix périlleux et douloureux. J’y ai d’ailleurs laissé des plumes. Un euro n’a pas la même valeur lorsque vous êtes un petit éditeur et lorsque vous êtes cadre dans un groupe comme Orange. Il faut bien sûr de la résilience lorsque vous êtes cadre supérieur dans un groupe comme Orange. Mais lorsqu’il vous faut aller chercher chaque jours les euros qui vous feront vivre, sans compter votre temps, sans perdre espoir, la résilience prend un nouveau sens. Vous êtes seul maître à bord, vous piloter tout, vous êtes à la fois administrateur, comptable, commercial, service client, chef de production… Et l’avenir de votre (petite) entreprise ne tient qu’à vos efforts.

Mais de telles épreuves ont contribué à me construire. De la résilience nait un autre type de confiance. Ma vie ne dépendait plus alors de la sécurité que pouvait procurer un poste de cadre et les revenus qui en découlent. Ma vie ne tenait maintenant plus qu’à ma capacité à me bâtir des compétences et à les valoriser. L’approche est différente.

En 2014, je suis revenu vers TBS. Après avoir rencontré Philippe Malaval, Geneviève Cazes-Valette et Jacques Igalens (alors directeur de TBS par interim), j’ai intégré que pour enseigner dans une grande école ou dans une université, il fallait être titulaire d’un doctorat. J’ai donc déposé un dossier et j’ai obtenu un contrat doctoral. C’est ainsi que je suis devenu enseignant-chercheur en marketing. J’ai soutenu ma thèse, qui portait sur l’engagement du consommateur dans la cocréation de valeur, en novembre 2018. Entretemps, j’ai intégré TBS en tant que coordinateur de programme et chargé du développement du campus de Paris. Ces trois années de doctorat ont à leur tour été une révélation. Trente ans après avoir quitté l’école (ESC Toulouse à l’époque), j’ai réappris les statistiques. Je suis reparti de zéro mais j’ai découvert une nouvelle méthodologie, inconnue dans le monde des affaires. J’ai appris une autre forme de rigueur. L’approche académique, maintenant enseignée en Master et même en Bachelor, a une vraie valeur.

Que vous ont apporté vos études dans cette réalisation personnelle et/ou professionnelle ? 

Le monde de l’enseignement a beaucoup changé depuis que je suis sorti de TBS. Bien sûr, je n’ai utilisé qu’une petite partie de ce que j’ai appris lors de mes différentes expériences professionnelles. Mais cet enseignement m’a été très utile. J’ai notamment appris à apprendre. La formation est la clé du succès aujourd’hui. A la vitesse où va le progrès, il est beaucoup plus sage d’apprendre à apprendre que d’accumuler les connaissances. Se remettre en question, se former, encore et toujours.

Où vous voyez-vous dans dix ans ?

L’enseignement-recherche est maintenant ma seule aspiration pour les dix ans à venir. Enseigner et publier… de préférence à Toulouse !

 

Comment vous positionnez-vous dans le réseau des alumni ?

Comment le réseau alumni a-t-il été un appui pour vous ?

Question très complexe. Et très contextuelle. En me lançant corps et âme dans la création d’une petite entreprise, j’ai aussi quitté un réseau. J’ai certes gardé un lien très fort avec mes anciens collègues d’Orange mais je n’ai pas fait vivre ce réseau. J’ai notamment arrêté de semer. Le réseau des alumni m’a permis de reconstruire des liens professionnels. Des relations d’une grande richesse, puisque plus diversifiées : Mes interactions ne se limitaient plus à l’écosystème d’Orange. Ces liens sont fondamentaux. Le réseau des alumni permet de se confronter à la diversité des parcours, de s’enrichir aux côtés de différentes générations, de partager des expériences, et ainsi, de placer de nouvelles briques dans notre édifice. Et pourquoi pas, de se créer de nouvelles opportunités.

Comment recommanderiez-vous son utilisation ?

Mon credo est le suivant : il faut semer avant de vouloir récolter. Cet état d’esprit est tout sauf simple à intégrer. Surtout lorsque l’on est jeune diplômé. Passer d’une vision court terme (mon premier job !) à une vision long terme (construire des relations de façon désintéressée) n’est pas naturel. Pourtant c’est ainsi que le réseau alumni s’avérera utile. Il faudra être patient. Au fil des nouvelles relations, des opportunités apparaitront. Par exemple, les alumni forment un réseau mondial. Être accueilli par les alumni lorsque vous débarquez dans une nouvelle ville, dans un nouveau pays a une valeur incomparable !

 

Quels conseils donneriez-vous aux alumni de TBS, étudiants ou diplômés ?

Donnez avant de vouloir recevoir, semez avant de penser à récolter.




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